J’ai récemment eu une conversation fort intéressante avec une copine sur le bilinguisme chez un bébé et l’apprentissage de plusieurs langues depuis tout petits. Ma copine, qui attend son premier bébé pour très bientôt, est polonaise et son mari espagnol, ils habitent à Madrid. Pour vous situer. En tant que jeune maman elle se pose des questions, ce qui est tout à fait normal et sain. Dans sa tête il est clair qu’elle va lui parler polonais et son mari espagnol mais…est-ce qu’il y a des limites ? On doit lui parler tout le temps dans cette langue dite maternelle ? Cela peut frôler le non respect et l’impolitesse quand on est entre amis, belle-famille et autres gens qui ne comprennent rien à cette langue ?
Une autre femme, anglaise et mariée aussi à un espagnol, maman de trois jeunes et belles filles me commentait presque au même moment, que l’anglais était SA LANGUE SECRÈTE entre elle et ses enfants mais qu’elle ne pouvait pas dire qu’elle leur avait tout le temps parlé en anglais, car justement elle considère un manque de respect de leur parler en anglais devant ses beaux-parents, par exemple; mais que parmi son entourage, des amies étaient beaucoup plus strictes et ne passaient jamais à la langue de la belle-famille.
Ma copine, la polonaise, me disait qu’elle ne voulait pas trop se pencher dans la lecture des innombrables livres existants sur le sujet, puisqu’elle avait peur de se noyer parmi autant d’information et points de vue différents.
Il y a eu une période où la question du bilinguisme chez un nourrisson était vu plutôt comme un problème. Des experts affirmaient que cela pouvait entraîner des problèmes d’apprentissage et de dyslexie, actuellement c’est bien le contraire, les enfants qui depuis un très jeune âge développent l’apprentissage d’une deuxième langue semblent être plus ouverts à l’acquisition d’une troisième et quatrième langue. Comme quoi, les goûts et les couleurs ça ne se discute pas.
Seulement un aspect m’interroge : l’apprentissage d’une langue fait appel à une dimension affective. Si l’enfant se sent plus proche de l’un de ses parents, il développera peut-être une préférence pour la langue avec laquelle il lui parle… Je pense que c’est bien vrai mais je ne voudrais pas que langue soit équivalent d’une préférence de la part de l’enfant envers le père ou la mère. Je ne pense pas du tout que cela se passe comme ça, surtout que tous ces couples qui se posent la question du bilinguisme chez son enfant sont des familles où l’une des deux langues n’est pas du tout parlée dans le pays où ils ont choisi d’habiter.
Moi personnellement j’ai aussi mon expérience à moi. Je suis bilingue mais pas parce que mes parents soient de langues différentes mais parce que je suis née dans un pays où le bilinguisme est assez courant. J’ai vécu toute mon enfance dans une région où la co-officialité des langues est présente, le catalan et le castillan je les ai appris en même temps. Ou presque, en fait je ne sais pas. Je me suis retrouvée souvent dans des situations surréalistes quand des gens me demandent comment j’ai appris à parler espagnol (castillan), ma réponse étant toujours : je ne sais pas. A quel âge ? je ne sais pas non plus… Je sais seulement que ma maman me disait « si tu viens de lire un livre en catalan maintenant tu en lis un en espagnol. Je sais seulement qu’à l’école j’avais des maîtresses qui venaient de la péninsule ibérique et qui étaient, donc hispanophones mais depuis le temps qu’elles habitaient sur l’île elles comprenaient le catalan, donc je pouvais très bien leur parler en catalan même si elles me répondaient en espagnol. Je sais seulement que, petite, j’ouvrais un journal et une page était écrite en catalan et celle d’à côté en espagnol.
Je pense donc que le bilinguisme peut être vu plutôt comme un avantage, je ne crois pas avoir eu des problèmes d’apprentissage, bien au contraire, je pense que le fait de connaître deux langues depuis petite m’a donné envie d’en apprendre encore d’autres.
En ce qui concerne le fait de parler cette langue maternelle pas comprise par une partie de la famille (voire par un des progéniteurs) ou amis, je vois cela comme une règle à établir entre papa et maman, même avant la naissance, il suffit de se mettre d’accord et de laisser les choses bien claires pour ne pas tomber dans des malentendus !